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La grande histoire du bouton de manchette

Si l’on souhaite comprendre l’origine des boutons de manchette, il faut en revenir à l’apparition de la chemise elle-même. Inventée il y a bien longtemps, la chemise est finalement l’un des vêtements les plus anciens et les plus communs qui soient. On en retrouve des traces dans de nombreuses cultures, en particulier en Occident, et à toutes les époques. Confectionnée en lin, en soie, en coton, en ortie, en chanvre ou en laine... le rôle de la chemise a été en premier lieu de protéger le corps. Le protéger du froid mais aussi des vêtements plus lourds, pas toujours très agréables à porter à même la peau. Une fonction de sous-vêtement et de chemise de nuit, certes cruciale mais néanmoins purement pratique. La chemise n’avait alors ni col ni manchettes et s’enfilait par la tête.

Tenue avec boutons de manchette

La naissance des boutons de manchette

Ce rôle des plus prosaïques commença à évoluer à la fin du XVe siècle. À cette époque, la chemise change de forme, en puisant son inspiration dans les tuniques perses ramenées des croisades. Le col et les manchettes apparaissent, et la chemise devient un vêtement masculin. Les premiers boutons de manchette apparaissent au XVIe siècle, alors que les hommes de bonne condition cherchent des accessoires pour enjoliver les parties apparentes de leurs chemises. Ces boutons de manchette, qui adoptent alors la forme de boutons en or ou en argent reliés par une chainette, remplacent les rubans et dentelles employés jusqu’alors pour fermer les manchettes.

Apparition du poignet mousquetaire

Il faudra attendre l’émergence du poignet mousquetaire, au XVIIIe siècle, pour que le bouton de manchette commence à trouver sa vraie place. La manche se rabat afin de former une doublure élégante dont le volume casse le classicisme et la monotonie de la chemise. Un poignet de cette envergure ne pouvant décemment pas se contenter d’un banal bouton, on commence à voir se multiplier les boutons de manchette qui deviennent alors des bijoux ou accessoires communs.

Cette popularité s’accentue au milieu du XIXe siècle, période de révolution industrielle durant laquelle les poignets amidonnés, devenus bien trop rigides pour tenir avec de simples boutons, justifient de manière définitive l’utilisation du bouton de manchette. La production de masse, qui a pour conséquence de réduire les coûts, permet à un nombre croissant d’hommes d’accéder à ce petit ornement. C’est également à cette époque que l’on assiste à la multiplication des systèmes d’attaches : à liaison rigide, à bâtonnet, à pression, à double effet, à chainettes extensibles. Sans jamais céder à la fantaisie débridée, le bouton de manchette, dont le rôle pratique et ornemental n’a pas changé, entre de plain-pied dans le modernisme.

Couleurs et fantaisies

Les boutons de manchette gagnent en couleurs et en fantaisie sous l’impulsion d’Édouard VII dont l’influence sur la mode masculine à la fin du XIXe siècle est indéniable. Il popularisera en particulier le bouton de couleur Fabergé. La confiance en soi et la richesse sont alors véhiculées par ce bijou, le seul acceptable pour l’homme de l’époque.

Au début du XXe siècle, les mouvements de l’Art Nouveau, du cubisme et de l’Art Déco s’emparent du bouton de manchette pour lui faire adopter les formes et les motifs les plus fous. Les grandes maisons de joaillerie de l’époque (Cartier, Tiffany, entre autres) se lancent dans l’élaboration de nouveaux design, employant des matières jusque-là inédites. Coco Chanel démocratise le bouton de manchette en émail de couleur intégrant des motifs géométriques très avant-gardistes. Les modèles de boutons de manchette en passementerie sont lancés à cette même époque par la Maison Charvet qui les offre à sa clientèle fortunée avec ses chemises de luxe. En somme, c’est une véritable révolution pour ce petit accessoire qui sort définitivement du classicisme en empruntant la grande porte : celui du monde du luxe et de la mode.

Entre formalisme et excentricité

Alors que les boutons de manchette ne cessent de gagner en originalité et en couleurs, une nouvelle mode masculine fait son apparition sur le devant de la scène : celle de la tenue sportive où les simples boutons suffisent. Les ventes de boutons de manchette subissent alors une perte de vitesse. À la fin de la seconde guerre mondiale, le smoking sort du fumoir pour se muer en une tenue de cocktail qui deviendra bientôt une norme aux USA et en Europe. Ce vêtement, à la fois formel et décontracté, redonnera ses lettres de noblesse à nos chers boutons de manchette. Quelques années plus tard, les dandys de Carnaby Street, symboles du Swinging London des années 1960, s’approprient le bouton de manchette pour marquer leur style vestimentaire unique, situé à mi-chemin entre élégance et excentricité.

Le retour en grâce du bouton de manchette

La mode hippie, symbolisée par le phénomène Woodstock, remet au goût du jour les boutons de chemise traditionnels. Au grand dam des boutons de manchette qui ont une nouvelle fois du mal à trouver leur place dans la garde-robe de la jeunesse des années 1970, principalement constituée de jeans et de chemises légères. Une mode en chassant une autre, c’est l’adaptation télévisuelle du célèbre roman d’Evelyn Waught, Brideshead Revisited (Retour à Brideshead, sous nos latitudes) qui va signer un véritable regain d’intérêt pour la mode des années 1920. Les boutons de manchette, mis de côté l’espace de quelques années, retrouvent leur succès d’antan chez les jeunes, toujours soucieux de leur look.

Enfin, dans les années 1990, le créateur Paul Smith va offrir de nouvelles perspectives à ce bijou que les femmes se mettent à envier aux hommes, même si elles sont encore bien peu à oser les arborer à leurs manches. Karl Lagerfeld dira d’ailleurs des boutons de manchette qu’ils “sont, en matière de bijoux, une des rares choses que les femmes aient laissées aux hommes.” Une gent masculine qui, sans doute par pudeur, préfère souvent y voir un accessoire de mode plutôt qu’un bijou.

Accessoire ou bijou, peu importe, le bouton de manchette est, aujourd’hui, pleinement inscrit dans son époque. Formels ou fantaisistes, les boutons de manchette se distinguent également par l’emploi d’une très grande variété de matières : Nacre, bois, tissus, corail, ivoire, acier, pierres précieuses, jais, porcelaine, verre... Un bouton de manchette qu’on ne relègue plus au seul costume trois-pièces. Et qu’on ose désormais porter de manière plus décontractée, avec une chemise mousquetaire et un jean.

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